La frontière franco-allemande et le canton de Rougemont

Par Jean de Zutter

 

A la suite de la défaite française de 1871, l’Allemagne s’empare de la majeure partie de l’Alsace et de la Lorraine, la nouvelle frontière résultant d’une série de 3 documents: l’article 1 des préliminaires de paix signés à Versailles, le 26 Février 1871[i], le traité de Francfort du 10 Mai 1871[ii] et un article additionnel au traité de Francfort, l’article 3[iii].    

Contrairement à l’époque moderne où ce sont les territoires cédés qui déterminent la frontière, ici, c’est la frontière qui délimite les territoires cédés. L’enveloppe détermine le contenu.  » Le tracé suit 2 principes distincts et qui se contredisent: un principe politico-administratif reprenant les limites des communes, cantons, arrondissements, départements prévalant en France; un autre physique, reprenant la ligne de crête, les cours d’eau ou les sources  » (Benoît Vaillot).     

Une commission mixte franco-allemande est chargée de déterminer le tracé de la ligne frontière matérialisée plus de 5 500 bornes du Luxembourg au Nord à la Suisse au Sud, la borne n° 1 étant située entre Hussigny-Godbranche (Meurthe-et-Moselle) et Rédange (Moselle) et la dernière borne, dans la forêt entre Réchésy (Territoire de Belfort) et Pfetterhouse (Haut-Rhin)[iv]. Les bornes comportent généralement 4 indications: un D (pour Deutchland) du côté tourné vers l’Alsace, un F (pour France ou plutôt Frankreich, car les bornes sont exclusivement dues au gouvernement allemand), une incision sur la partie sommitale indiquant la direction de la borne précédente et de la borne suivante et sur un des côtés, un numéro. La distance séparant 2 bornes est relativement faible: une centaine de mètres environ. Aux points de passages routiers (entre Rougemont et Masevaux ou Lauw, entre Lachapelle et Soppe-le-Haut), les bornes étaient remplacées par des blocs en forme de pyramide tronquée de presque 2 m de haut portant écrit en toutes lettres les indications            » France  » et  » Deutschland « .

Dans le Territoire de Belfort, le point le plus au Nord (47° 49′ 30 » Nord) est situé dans le village de Lepuix (un peu au Nord de la statue de Jeanne d’Arc, au sommet du ballon d’Alsace), le point le plus au Sud (47° 26′ Nord) est à Croix, le plus à l’Ouest (6° 45′ 23 » Est), à Auxelles-Bas et le plus à l’Est (7° 08′ 36 » Est), à Réchésy et dans le canton de Rougemont-le-Château tel qu’il a existé entre 1983 et 2015, le point le plus au Nord (47° 46′ 22 » Nord) est près du Lochberg, à la limite entre les villages de Lamadeleine-Val-des-Anges et Kirchberg (Haut-Rhin). C’est aussi près de ce lieu que se situe le point situé le plus à l’Ouest (6° 53′ 20 » E), également à Lamadeleine-Val-des-Anges; le point situé le plus au Sud (47° 41′ 21 » Nord) étant à Saint-Germain-le-Chatelet et le plus à l’Est (7° 2′ 16 » Est) à Lachapelle-sous-Rougemont, au Sud de l’étang de la Belle-Escale.  

Par rapport au canton de Rougemont-le-Château tel qu’il a existé entre 1983 et 2015, les villages limitrophes de la frontière étaient du Sud au Nord: Lachapelle-sous-Rougemont (qui à l’époque appartenait au canton de Fontaine), Petitefontaine, Leval, Rougemont-le-Château et Lamadeleine-Val-des-Anges (qui faisait alors partie du canton de Giromagny). Dans le Haut-Rhin, les villages de la frontière relevaient du canton de Dannemarie (Eteimbes) et du canton de Masevaux pour les autres (Soppe-le-Haut, Mortzwiller, Masevaux, Kirchberg et Dolleren). 

Eteimbes (dans le Haut-Rhin) possédait 41 bornes frontières, de la numéro       3 661, à la frontière entre Lachapelle-sous-Rougemont et Soppe-le-Haut, à la 3 701 entre    Eteimbes et Vauthiermont (canton de Fontaine) mais actuellement, il n’en subsiste plus que 25[v], des bornes ayant été déplacées telle la numéro 3 672 implantée près de la salle polyvalente.

Lachapelle-sous-Rougemont  possède en commun avec Eteimbes et Soppe-le-Haut une vingtaine de bornes.

Des bornes situées entre Rougemont-le-Château et Masevaux, plusieurs ont disparues. La borne 3 495 a été déplacée de son lieu d’implantation pour être érigée devant le Foyer rural de Rougemont avec d’autres bornes sur un plan illustré de la commune: une borne des Rothenberg, seigneurs de Rougemont au XVIe siècle, 2 bornes des seigneuries réunies de Rougemont et Masevaux qui datent du XVIIIe siècle[vi], une borne des Rosen, seigneurs de Rougemont et Masevaux à la fin du XVIIe et au XVIIIe siècle[vii] et une borne forestière des d’Anthès[viii], maîtres de forges, datant du XVIIIe siècle, ces 6 bornes étant accompagné par le blason des comtes de Ferrette, seigneurs de Rougemont au Moyen Age et d’un ancien blason de la ville, réalisé, en 2005, par des Compagnons du Devoir.

Les bornes délimitent un terrain. Elles sont l’expression d’une coupure, d’une exclusion, d’une frontière. La frontière divise mais en même temps elle crée des liens. Elle stimule les échanges, favorise les trafics et la contrebande. Les résidents proches de la frontière vont acheter les produits dont ils ont besoin là où les prix sont les plus bas, ils travaillent là où les salaires sont les plus élevés et demeurent là où les impôts sont les plus faibles et les conditions de vie les meilleures et comme les systèmes fiscaux sont toujours différents en-deçà et au-delà de la frontière, il existe toujours des différences, des échanges et des trafics (à quelques exceptions près: le rideau de fer, le 38e parallèle entre les 2 Corées, le mur de la honte entre Israël et la Palestine…). La région couverte de forêts était propice au trafic. Avec le développement du commerce, se multiplient les débits de boisson et les libations entraînent des rixes parfois mortelles. L’esprit revanchard qui se développe chez les français et un certain sentiment anti-français chez les alsaciens favorisent les bagarres. Zone frontière, la région devient un asile pour les délinquants. Après un mauvais coup, les auteurs franchissent la frontière et se mettent à l’abri des gendarmes français en Alsace et des policiers allemands en France!  

Entre 1871 et 1914, près de 800 incidents frontaliers se sont produits sur la frontière franco-allemande, étant considéré comme incident frontalier un incident qui se produit aux alentours de la frontière et fait l’objet par ailleurs d’un échange diplomatique.

A la frontière et sur les voies de communication se trouvaient des postes de douanes, à Lachapelle-sous-Rougemont (maison Probst) et à Soppe-le-Bas (maison Bitsch) puis à Eteimbes[ix] au Sud, à Rougemont-le-Château dans une maison qui appartient aujourd’hui la municipalité (la maison Charles), à Lauw (à l’intersection des routes de Rougemont à Lauw et de Rougemont à Mortzwiller) et à Masevaux au Nord.

Rougemont qui rassemblait 1 630 habitants, en 1872, va en compter 2 338, en 1901, et le canton de Rougemont, qui avait 2 421 habitants en 1872, 3 006 en 1901, des chiffres qu’ils n’atteindront plus jamais par la suite (tout au moins tel que le canton a existé jusqu’en 1981). Un dynamisme lié au rôle de frontière que va jouer le canton de 1871 à 1918 mais aussi au rôle de refuge qu’il assure pour une partie de la population des villages alsaciens voisins qui refuse de devenir allemande. 

[i] Article 1 des préliminaires de paix:

      »  La France renonce, en faveur de l’Empire allemand, à tous ses droits et titres sur les territoires situés à l’est de la frontière ci-après désignée :

     La ligne de démarcation commence à la frontière nord-ouest du canton de Cattenom (Moselle), vers le grand-duché de Luxembourg ; suit, vers le sud, les frontières occidentales des cantons de Cattenom et Thionville, passe par le canton de Briey en longeant les frontières occidentales des communes de Montois-la-Montagne et Roncourt, ainsi que les frontières orientales des communes de Marie-aux-Chênes, Saint-Ail, atteint la frontière du canton de Gorze, qu’elle traverse le long des frontières communales de Vionville, Chambley et Onville, suit la frontière sud-ouest de l’arrondissement de Metz, la frontière occidentale de l’arrondissement de Château-Salins jusqu’à la commune de Pettoncourt, dont elle embrasse les frontières occidentale et méridionale, pour suivre la crête des montagnes entre la Seille et Moncel jusqu’à la frontière de l’arrondissement de Strasbourg au sud de Garde.

     La démarcation coïncide ensuite avec la frontière de cet arrondissement jusqu’à la commune de Tanconville, dont elle atteint la frontière au nord ; de là, elle suit la crête des montagnes entre les sources de la Sarre blanche et de la Vezouze jusqu’à la frontière du canton de Schirmeck, longe la frontière occidentale de ce canton, embrasse les communes de Saales, Bourg-Bruche, Colroy, La Roche, Plaine, Ranrupt, Saulxures et Saint-Blaise-la-Roche du canton de Saales, et coïncide avec la frontière occidentale des départements du Bas-Rhin et du Haut-Rhin jusqu’au canton de Belfort, dont elle quitte la frontière méridionale non loin de Vourvenans pour traverser le canton de Delle, aux limites méridionales des communes de Bourgogne et Froide-Fontaine et atteindre la frontière suisse, en longeant les frontières orientales des communes de Joncherey et Delle.

     La frontière, telle qu’elle vient d’être décrite, se trouve marquée en vert sur deux exemplaires conformes de la carte du territoire formant le gouvernement général d’Alsace, publiée à Berlin en septembre 1870 par la division géographique et statistique de l’état-major général et dont un exemplaire sera joint à chacune des deux expéditions du présent traité.

     Toutefois le tracé indiqué a subi les modifications suivantes de l’œuvre des deux parties contractantes : dans l’ancien département de la Moselle, les villages de Marie-aux-Chênes, près de Saint-Privat-la-Montagne et de Vionville, à l’ouest de Rezonville, seront cédés à l’Allemagne. Par contre, la ville et les fortifications de Belfort resteront à la France, avec un rayon qui sera déterminé ultérieurement « .

[ii] Article 1 du traité de Francfort:

   » La distance de la ville de Belfort à la ligne frontière, telle quelle a été d’abord proposée lors des négociations de Versailles… est considérée comme indiquant la mesure du rayon que, en vertu de la clause y relative du premier article des préliminaires, doit rester à la France avec la ville et les fortifications de Belfort, 

  Le gouvernement allemand est disposé à élargir ce rayon de manière qu’il comprenne les cantons de Delle et de Giromagny, ainsi que la partie occidentale du canton de Fontaine, à l’ouest d’une ligne à tracer du point où le canal du Rhône au Rhin sort du canton de Delle, au sud de Montreux-Château, jusqu’à la limite nord du canton entre Bourg et Felon, où cette ligne joindrait la limite du canton de Giromagny.

     Le Gouvernement allemand, toutefois, ne cédera les territoires susindiqués qu’à la condition que la République française, de son côté,  consentira à une rectification de frontière le long des limites occidentales des cantons de Cattenom et de Thionville qui laissera à l’Allemagne le terrain à l’estd’une ligne partant de la frontière du Luxembourg entre Hussigny et Redingen, laissant à la France les villages de Thil et de Villerupt, se prolongeant entre Errouville et Aumetz, entre Beuvillers et Boulange, entre Trieux et Lomeringen, et joignant l’ancienne ligne de frontière entre Avril et Moyeuvre « .

[iii] 3e article additionnel au traité de Francfort:

   » La cession du territoire auprès de Belfort offerte par le gouvernement allemand dans l’article premier du présent Traité, en échange de la rectification de frontière demandée à l’ouest de Thionville, sera augmentée des territoires des villages suivants: Rougemont, Leval, la Petite-Fontaine, Romagny, Félon, la Chapelle-sous-Rougemont, Angeot, Vauthiermont, la Rivière, la Grange, Reppe, Fontaine, Frais, Foussemagne, Cunelières, Montreux-le-Château, Bretagne, Chavannes-les-Grandes, Chavannatte et Suarce.

     La route de Giromagny à Remiremont passzant au ballon d’Alsace restera à la France dans tout son parcours et servira de limite en tant qu’elle est située en dehors du canton de Giromagny « .     

[iv] Si les bornes sont numérotées de 1 à 4 056, il existe parfois des bornes intermédiaires: bornes sans numéros entre les bornes 3 454 et 3 455, 3 635 et 3 636, 3 640 et 3 641, 3 643 et 3 644, 3 650 et 3  651, 3 654 et 3 655, borne numérotée 1, entre les bornes 3 551 et 3 552, borne numérotée 2 alors qu’il n’esiste pas de borne 1, entre les bornes 3 470 et 3 471…

[v] Les bornes 3 663, 3 664, 3 665, 3 666, 3 667, 3 673, 3 674, 3 678, 3 679, 3 681,  3 690, 3 691, 3 692, 3 693,     3 695 et 3 699 ont disparu.  

[vi] En 1730, Nicolas du Blé marquis d’Huxelles et seigneur de Rougemont (resté célibataire) meurt sans postérité.  Louis XV alors attribue la seigneurie à Conrad-Alexandre de Rothenberg (1684-1735) qui était déjà seigneur de Masevaux et c’est avec lui qu’est mise en place l’administration communes des seigneuries de Rougemont et Masevaux. A la mort de Conrad-Alexandre de Rothenberg, lui aussi sans enfant, ses titres vont à ses sœurs (l’une, Anne-Louise-Claire était chanoinesse à Remiremont et l’autre est Jeanne-Octavie de Rothenberg).

[vii] En 1731, Jeanne-Octavie de Rothenberg (1715-1788) épouse Anne-Armand de Rosen (1711-1749), lui apportant en dot la seigneurie de Rougemont. Leur fils Eugène-Octave-Augustin de Rosen (1737-1774) étant mort avant sa mère, le fief passe ensuite à leur petite-fille, Sophie de Rosen (1767-1828) qui épouse, en 1779, Charles-Louis-Victor de Broglie (1757-1794) qui plus tard devint député de la noblesse aux Etats-Généraux avant d’être guillotiné durant la Terreur.

[viii] De très lointaine origine suédoise, les d’Anthès étaient venus d’Allemagne après la Guerre de Trente Ans. D’abord installés à Belfort (forges et haut-fourneau) et à Giromagny (mines argentifères), ils prennent à ferme le haut-fourneau d’Oberbruck, ouvrent une manufacture de fer blanc à Wegscheid, s’installent à Masevaux (forges et haut-fourneau). Après le contrôle de la sidérurgie de la vallée de la Doller, ils étendent leur influence en Alsace, achètent des seigneuries, en Alsace et en Bourgogne, et sont anoblis en 1730. A l’époque, la technologie d’obtention du fer passe par la fonte au bois qui nécessite d’énormes quantités de charbon de bois et les maîtres de forge doivent pouvoir disposer de vastes forêts. C’est en 1709 seulement qu’Abraham Darby (1678-1717) réussit pour la première fois à obtenir de la fonte à partir du charbon modifié (coke) mais la fonte était sans doute d’assez mauvaise qualité et mit plus de 50 ans à s’imposer en Angleterre, la première coulée en France ayant lieu à Hayange, en 1769 chez les de Wendel.

[ix] La contrebande était importante aussi, pour mieux surveiller la frontière, les douanes allemandes firent construire, à partir de 1907, aux environs de la Belle-Escale, un nouveau bâtiment  des douanes dont il ne reste rien aujourd’hui car il fut détruit par des artilleurs français qui se repliaient depuis Mulhouse. 

  1. Article 1 des préliminaires de paix:

      »  La France renonce, en faveur de l’Empire allemand, à tous ses droits et titres sur les territoires situés à l’est de la frontière ci-après désignée :

     La ligne de démarcation commence à la frontière nord-ouest du canton de Cattenom (Moselle), vers le grand-duché de Luxembourg ; suit, vers le sud, les frontières occidentales des cantons de Cattenom et Thionville, passe par le canton de Briey en longeant les frontières occidentales des communes de Montois-la-Montagne et Roncourt, ainsi que les frontières orientales des communes de Marie-aux-Chênes, Saint-Ail, atteint la frontière du canton de Gorze, qu’elle traverse le long des frontières communales de Vionville, Chambley et Onville, suit la frontière sud-ouest de l’arrondissement de Metz, la frontière occidentale de l’arrondissement de Château-Salins jusqu’à la commune de Pettoncourt, dont elle embrasse les frontières occidentale et méridionale, pour suivre la crête des montagnes entre la Seille et Moncel jusqu’à la frontière de l’arrondissement de Strasbourg au sud de Garde.

     La démarcation coïncide ensuite avec la frontière de cet arrondissement jusqu’à la commune de Tanconville, dont elle atteint la frontière au nord ; de là, elle suit la crête des montagnes entre les sources de la Sarre blanche et de la Vezouze jusqu’à la frontière du canton de Schirmeck, longe la frontière occidentale de ce canton, embrasse les communes de Saales, Bourg-Bruche, Colroy, La Roche, Plaine, Ranrupt, Saulxures et Saint-Blaise-la-Roche du canton de Saales, et coïncide avec la frontière occidentale des départements du Bas-Rhin et du Haut-Rhin jusqu’au canton de Belfort, dont elle quitte la frontière méridionale non loin de Vourvenans pour traverser le canton de Delle, aux limites méridionales des communes de Bourgogne et Froide-Fontaine et atteindre la frontière suisse, en longeant les frontières orientales des communes de Joncherey et Delle.

     La frontière, telle qu’elle vient d’être décrite, se trouve marquée en vert sur deux exemplaires conformes de la carte du territoire formant le gouvernement général d’Alsace, publiée à Berlin en septembre 1870 par la division géographique et statistique de l’état-major général et dont un exemplaire sera joint à chacune des deux expéditions du présent traité.

     Toutefois le tracé indiqué a subi les modifications suivantes de l’œuvre des deux parties contractantes : dans l’ancien département de la Moselle, les villages de Marie-aux-Chênes, près de Saint-Privat-la-Montagne et de Vionville, à l’ouest de Rezonville, seront cédés à l’Allemagne. Par contre, la ville et les fortifications de Belfort resteront à la France, avec un rayon qui sera déterminé ultérieurement « .

 

2) Article 1 du traité de Francfort:

   » La distance de la ville de Belfort à la ligne frontière, telle quelle a été d’abord proposée lors des négociations de Versailles… est considérée comme indiquant la mesure du rayon que, en vertu de la clause y relative du premier article des préliminaires, doit rester à la France avec la ville et les fortifications de Belfort, 

  Le gouvernement allemand est disposé à élargir ce rayon de manière qu’il comprenne les cantons de Delle et de Giromagny, ainsi que la partie occidentale du canton de Fontaine, à l’ouest d’une ligne à tracer du point où le canal du Rhône au Rhin sort du canton de Delle, au sud de Montreux-Château, jusqu’à la limite nord du canton entre Bourg et Felon, où cette ligne joindrait la limite du canton de Giromagny.

     Le Gouvernement allemand, toutefois, ne cédera les territoires susindiqués qu’à la condition que la République française, de son côté,  consentira à une rectification de frontière le long des limites occidentales des cantons de Cattenom et de Thionville qui laissera à l’Allemagne le terrain à l’estd’une ligne partant de la frontière du Luxembourg entre Hussigny et Redingen, laissant à la France les villages de Thil et de Villerupt, se prolongeant entre Errouville et Aumetz, entre Beuvillers et Boulange, entre Trieux et Lomeringen, et joignant l’ancienne ligne de frontière entre Avril et Moyeuvre « .

 

3) 3e article additionnel au traité de Francfort:

   » La cession du territoire auprès de Belfort offerte par le gouvernement allemand dans l’article premier du présent Traité, en échange de la rectification de frontière demandée à l’ouest de Thionville, sera augmentée des territoires des villages suivants: Rougemont, Leval, la Petite-Fontaine, Romagny, Félon, la Chapelle-sous-Rougemont, Angeot, Vauthiermont, la Rivière, la Grange, Reppe, Fontaine, Frais, Foussemagne, Cunelières, Montreux-le-Château, Bretagne, Chavannes-les-Grandes, Chavannatte et Suarce.

     La route de Giromagny à Remiremont passzant au ballon d’Alsace restera à la France dans tout son parcours et servira de limite en tant qu’elle est située en dehors du canton de Giromagny « .     

 

4) Si les bornes sont numérotées de 1 à 4 056, il existe parfois des bornes intermédiaires: bornes sans numéros entre les bornes 3 454 et 3 455, 3 635 et 3 636, 3 640 et 3 641, 3 643 et 3 644, 3 650 et 3  651, 3 654 et 3 655, borne numérotée 1, entre les bornes 3 551 et 3 552, borne numérotée 2 alors qu’il n’esiste pas de borne 1, entre les bornes 3 470 et 3 471…

 

5) Les bornes 3 663, 3 664, 3 665, 3 666, 3 667, 3 673, 3 674, 3 678, 3 679, 3 681,  3 690, 3 691, 3 692, 3 693,     3 695 et 3 699 ont disparu.  

 

6)  En 1730, Nicolas du Blé marquis d’Huxelles et seigneur de Rougemont (resté célibataire) meurt sans postérité.  Louis XV alors attribue la seigneurie à Conrad-Alexandre de Rothenberg (1684-1735) qui était déjà seigneur de Masevaux et c’est avec lui qu’est mise en place l’administration communes des seigneuries de Rougemont et Masevaux. A la mort de Conrad-Alexandre de Rothenberg, lui aussi sans enfant, ses titres vont à ses sœurs (l’une, Anne-Louise-Claire était chanoinesse à Remiremont et l’autre est Jeanne-Octavie de Rothenberg).

 

7) En 1731, Jeanne-Octavie de Rothenberg (1715-1788) épouse Anne-Armand de Rosen (1711-1749), lui apportant en dot la seigneurie de Rougemont. Leur fils Eugène-Octave-Augustin de Rosen (1737-1774) étant mort avant sa mère, le fief passe ensuite à leur petite-fille, Sophie de Rosen (1767-1828) qui épouse, en 1779, Charles-Louis-Victor de Broglie (1757-1794) qui plus tard devint député de la noblesse aux Etats-Généraux avant d’être guillotiné durant la Terreur.

 

8) De très lointaine origine suédoise, les d’Anthès étaient venus d’Allemagne après la Guerre de Trente Ans. D’abord installés à Belfort (forges et haut-fourneau) et à Giromagny (mines argentifères), ils prennent à ferme le haut-fourneau d’Oberbruck, ouvrent une manufacture de fer blanc à Wegscheid, s’installent à Masevaux (forges et haut-fourneau). Après le contrôle de la sidérurgie de la vallée de la Doller, ils étendent leur influence en Alsace, achètent des seigneuries, en Alsace et en Bourgogne, et sont anoblis en 1730. A l’époque, la technologie d’obtention du fer passe par la fonte au bois qui nécessite d’énormes quantités de charbon de bois et les maîtres de forge doivent pouvoir disposer de vastes forêts. C’est en 1709 seulement qu’Abraham Darby (1678-1717) réussit pour la première fois à obtenir de la fonte à partir du charbon modifié (coke) mais la fonte était sans doute d’assez mauvaise qualité et mit plus de 50 ans à s’imposer en Angleterre, la première coulée en France ayant lieu à Hayange, en 1769 chez les de Wendel.

 

9) La contrebande était importante aussi, pour mieux surveiller la frontière, les douanes allemandes firent construire, à partir de 1907, aux environs de la Belle-Escale, un nouveau bâtiment  des douanes dont il ne reste rien aujourd’hui car il fut détruit par des artilleurs français qui se repliaient depuis Mulhouse.